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Chapitre III

 

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Hydrographie

La Sèvre Niortaise.

On peut dire qu'un seul cour d'eau, la Sèvre Niortaise, arrose cette commune.

Issue de la fontaine de Fontbedoire, en la commune de Sepvret, ce n'est qu'un filet d'eau à l'origine, un simple ruisselet qui s'en va serpentant dans les prairies de Sepvret et de Chey, à travers les iris soufflés et les renoncules aux boutons d'or. Il disparaît à certains moments sous des arcades de verdure que lui forment clématites, houblon et ronces entrelacés; et si ce n'étaient les aulnes et les peupliers qui le bordent, on aurait peine à le distinguer.

A peine a-t-il parcouru trois ou quatre kilomètres qu'il reçoit un premier affluent issu de la fontaine de Fontblanche, mais hélas! D'un appoint tellement faible qu'il serait difficile de reconnaître le petit fleuve qui ira se perdre dans le grand océan.

Au moment où elle va pénétrer dans la commune d'Exoudun, la Sèvre Niortaise disparaît brusquement dans un parcours de quelques mètres. Cette disparition s'explique par suite de nombreuses fissures qui existent dans les assises calcaires sur lesquelles repose son lit. Autrefois, le peuple qui ne se rendait pas compte des phénomènes auxquels on doit attribuer la perte de la Sèvre, n'hésitait pas à attribuer cette disparition à des causes surnaturelles. La saine raison a prévalu depuis et la géologie est venue nous donner l'explication de ce phénomène.

Le courant, devenu souterrain suit le fond de la vallée, alimente en passant le puits communal de Breuil, la fosse de même nom, sorte d'excavation circulaire en forme d'entonnoir au fond de laquelle on entend le bouillonnement des eaux circulant à travers les fissures des couches oxfordiennes. A l'époque des fortes pluies de printemps ou d'automne, le conduit souterrain devient insuffisant. L'eau remplit aussitôt la cavité de l'entonnoir et se répand dans les enclos qui se trouvent en aval. Il y a alors deux courants: l'un aérien et l'autre souterrain qui resurgi aux fontaines de Bagnault.

A partir de la jonction de ces courants, le lit du cours d'eau est nettement tracé entre une double rangée de contre-murs dans lesquels de nombreuses et fort belles anguilles élisent leurs demeures. Il reçoit en passant le tribut issu de la fontaine des Bancs ou des Bains, arrive au pont sous lequel il franchit l'antique voie, d'origine romaine, qui reliait autrefois Bagnault à la mer et reçoit presque aussitôt les eaux de la fontaine de Thuet dont l'apport appréciable double presque son volume d'eau. Son lit s'élargit, devient plus profond, et de simple ruisseau qu'elle était jusqu'alors, la Sèvre prend maintenant apparence de rivière, je n'ose encore dire de petit fleuve. Elle suffit du reste à alimenter Moulin-Neuf, le premier de ces antiques et vénérables moulins de la commune qui depuis tant de siècles font entendre aux échos de la vallée leur tic-tac monotone.

Jusqu'à Exoudun, le lit de la Sèvre est plutôt vaseux, mais pendant la traversée du bourg, entre les moulins de Crémille et de Planche, le courant devenant plus rapide, ne laisse plus déposer aucun limon et coule alors sur un fond pierreux qui lui a été tracé entre les murs des jardins et des maisons. C'est après Planche que la fontaine Bouillante verse sans interruption un énorme volume d'eau.

Partant de là, la Sèvre arrive tout de suite au vieux moulin de Roche qu'elle baigne et alimente en passant; elle fait un circuit pour contourner les hauteurs des Chaumes et se divise en deux bras en amont d'Izarnay. L'un de ces bras va baigner le pied des maisons et revient ensuite apporter ses eaux au courant principal qui se divise à nouveau quelques mètres en aval du pont de la Baignoire. La majeure partie des eaux se dirige vers le moulin de Grand-Vault tandis que l'autre, après avoir décrit à travers les prairies qu'il contourne, une suite de méandres, rejoint le principal cours à la limite communale.

Pendant les cinq premiers siècles de notre ère, la Sèvre fut inconnue, parait-il, aux habitants de nos contrées. L'océan remontait jusqu'aux portes de Niort par un golfe allongé qui se continuait en amont de cette ville par des marécages au milieu desquels se perdait le cours d'eau. Vers le commencement du sixième siècle, un phénomène géologique ayant provoqué un exhaussement du sol et un recul de la mer, la vallée fut à découvert, le cours de la rivière se dessina plus nettement, le lac de Vauclair se vida peu à peu de sorte que certains centres tels qu'Exoudun, La Mothe et Saint-Maixent purent, dans la suite, édifier de nouvelles demeures sur les rives désormais accessibles que ce retrait mettait à découvert.

Les noms latins donnés à la Sèvre dans les anciennes chartes sont assez nombreux; en voici la liste chronologique: Severa (932, Cartulaire de Saint Cyprien); Severis (951 et 953, Cartulaire de Saint Maixent); fluvium Sevriaco (966, La Fontenelle de Vaudoré, Recherches sur les vigueries); Sevriacus (969 Cartulaire de Saint Cyprien)); Severoe (987, Cartulaire de Nouaillé); Sevira (vers 1000, Cartulaire de Saint Cyprien); Sevrix (1003, même Cartulaire); flumen Severa (1041, Cartulaire de Saint Maixent); Separis, Separim (XII° siècle, Besly, Histoire des comtes de Poitou); pratum juxta Sayvre (1258, Enquête des commissaires d'Alphonse de Poitou); la Seyvre (1473-1799-1500 A., Archives de la Barre la Soyvre (1501, A.Richard -id-); la Sepvre (1432/1504, A. Richard -id-); la Seure (1566, Itinéraire du roi Charles IX en Poitou); la Saivre (1554, archives communales de Niort); la rivière de Scayvre (1617, A. Richard. Archives de la Barre) etc..

Je terminerai en disant que l'étiage de la Sèvre est faible à Exoudun; cependant, au moment des fortes crues, elle roule un volume d'eau parfois considérable. Presque chaque hiver elle sort de son lit, se répand dans les prairies riveraines où elle abandonne une légère couche de limon. Ces inondations, qui n'ont rien de bien effrayant, sont dues en partie aux eaux de ruissellement qui rejoignent les bas-fonds après un trajet variable et surtout aux eaux d'infiltrations qui ressortent ensuite sous forme de sources pérennes ou temporaires.

Il y a eu des inondations assez nombreuses à Exoudun au cours des siècles précédents. Quelques-unes ont causé parfois des dégâts assez graves, mais sans donner lieu cependant à ces calamités qui ravagent et ruinent une contrée. La dernière digne d'être citée est du 18 juin 1898. Dans l'après-midi de ce jour, par une chaleur torride, un violant orage s'éleva dans la région de Celles sur Belle dirigeant ses eaux vers la vallée de la Sèvre. Pendant trois heures, il plut à torrents, à tel point que le moindre ruisseau fut changé en une nappe d'eau large d'une centaine de mètres et que les communications furent momentanément interrompues. A sept heures du soir, l'eau venant de toutes parts se précipitait dans la vallée de la Sèvre dont le niveau s'éleva subitement de trois mètres au moins.

A Exoudun, certaines maisons se trouvèrent inondées jusqu'à hauteur du premier étage, des murs furent démolis, la chaussée du moulin de Planche emportée et de nombreux débris entraînés par ce torrent dévastateur. De longtemps on n'avait vu semblable désastre.

Le ruisseau de Fontblanche, premier affluent de la Sèvre Niortaise, prend sa source à la fontaine et au village de même nom. Après avoir coulé sur un parcours de trois cents mètres environ, il pénètre dans la commune de Sepvret, alimente le moulin de Foucault, arrose quelques prairies et ne rejoint la Sèvre que pour disparaître aussitôt avec elle dans les profondeurs du sol.

Le ruisseau de Pelouse rejoint la Sèvre à Exoudun " est-il dit dans la statistique du département des Deux-Sèvres de Dupin. Il s'agit évidemment du petit cours temporaire qui prend naissance à la fontaine du Rocher et que les fortes pluies d'hiver arrivent parfois à grossir suffisamment pour en former une sorte de ruisseau qui se déverse ensuite dans le lit de la rivière un peu en amont de Crémille.

Les Accourants, ainsi dénommés par les habitants de Bagnault, ne sont chose qu'une sorte de courant intermittent qui, à certaines époques seulement envahit la vallée du Breuil de Chenay à Bagnault et vient se déverser dans la Sèvre. Chaque année, quand l'hiver est humide et sujet à de fortes averses, le courant, de force et d'intensité très variable, suit la pente inclinée, l'amène auprès du vieux carrefour de la Coupe d'Or, où traverse, sous un pont, le chemin d'intérêt communal de Saint-Pompain à Couhé et vient mélanger ses eaux boueuses à celles de la fontaine des Bancs.

Ce nom d'accourant, donne non seulement au ruisseau mais par extension à certaines parties du terrain parcouru par les eaux et du, je crois, au grand nombre de lits ......................... dont le fusionnement produit le cours principal. Tous, se dirigeant vers le fond du vallon où s'opère leur jonction, semblent accourir en hâte vers ce point de concentration et peut-être faut-il voir là l'origine du mot accourants, ainsi donné parce que l'eau accourt rapidement et de tous côtés.

Dans une brochure éditée en 1856, Jules Richard dénomme ce cours temporaire " la Courante " et un papier censif de la seigneurie de la Lande établi en 1766, lui donne le même nom.

 Fontaines.

Indépendamment des cours d'eau dont je viens de parler, il existe dans cette commune un certain nombre de fontaines dignes d'être citées. Une seule d'entre elles contribuerait dans une large mesure au bien-être d'une localité moins favorisée sous le rapport hydrographique. La nature semble en effet avoir prodigué aux habitants d'Exoudun l'eau claire et limpide alors qu'en d'autres lieux, peu éloignés, elle en a été si ingrate.

Que de fois, au cours des années sèches, les habitants de Chenay; du Breuil de Chenay, de Jassay et autres lieux ne sont-ils pas venus chercher aux fontaines de Bagnault le précieux élément liquide indispensable à leur alimentation et à celle de leurs animaux? On voyait alors la longue théorie de leurs véhicules, aux formes les plus diverses, chargés de tonneaux de toutes dimensions, s'acheminer, nuit et jour, aux bords de ces fontaines pour revenir ensuite lentement, sur les routes poudreuses, à leur point de départ.

A quelques-unes de ces fontaines se rattache une légende, une ancienne coutume, un souvenir qui s'est transmis d'âge en âge. De nombreuses transformations en ont certes altéré la forme, mais sans en détruire, je crois, l'idée principale. Il m'a paru intéressant de faire connaître ce qui concerne chacune d'elles.

Les fontanelles de Bagnault. Elles sont au nombre de deux que l'on pourrait dénommer la petite et la grande si l'on se basait uniquement sur le volume d'eau qu'elles débitent, mais auxquelles le temps et l'usage ont valu, à la première, le nom de " fontanelle de la potinière " et à l'autre, celui de " fontanelle " tout court. Elles se trouvent à la base occidentale du coteau sur lequel quelques maisons du village élèvent leurs blanches façades, et en face l'emplacement où s'élevait autrefois l'ancien hôpital, emplacement auquel on a conservé le nom significatif de " pré de la pitault " ou pré de l'hôpital.

La fontaine de la Potinière est la plus en amont et marque de ce fait une première résurgence des eaux de la Sèvre, mais résurgence peu importante et assez irrégulière puisqu'elle ne peut assurer à cette fontanelle un débit continue. Elle cesse de couler à peu près tous les ans dans le courant de l'été à moins que l'abondance des pluies n'en assure le courant régulier. On a observé toutefois que lorsque cette fontaine cesse de couler, celle, dite des Bancs, cesse également dans un délai de trois jours.

La Fontanelle proprement dite est une très belle source qui sort à flanc de coteau et coule ensuite sur un lit de sable fin. Son eau est claire, limpide, très fraîche en été, presque tiède en hiver, et toujours propre à l'alimentation, même au moment des fortes crues à l'action desquelles elle reste tout à fait étrangère.

Nul doute que cette source ne soit due à la résurgence d'une partie des eaux de la Sèvre............. il y a de grandes probabilités pour que les eaux d'infiltrations provenant de la plaine qui s'étend entre Bagnault, Breuil et Chenay y apportent aussi leur contingent. La réunion de ces eaux, d'origines différentes, assure à la source qu'elles alimentent un débit régulier et permanent qui lui permet de subvenir aux besoins de la moitié de la population du village.

Rien ne distingue cette fontaine. En sortant du puisard, ses eaux traversent un lavoir recouvert par un hangar rustique sous lequel le babillage des laveuses domine facilement le bruissement des eaux qui dévalent la pente rapide pour aller grossir le faible courant de la Potinière.

Fontaine des Bains ou des Bancs. Au centre du village de Bagnault, en face l'ancienne hôtellerie du cheval blanc, et non loin du carrefour de la Coupe d'Or, où se croissaient autrefois les chemins qui partent de Poitiers et de Rom, se dirigeait vers La Rochelle et Nantes, se trouve la fontaine dénommée originairement " des Bains " et " des Bancs " depuis le moyen-âge.

Elle est située dans une excavation profonde de deux mètres environ et dans laquelle on pénètre par un large escalier de construction toute récente. A la base, et à gauche de l'escalier, la fontaine; à droite, un lavoir, le tout recouvert par un hangar.

La source qui alimente fontaine et lavoir émerge au fond d'un puisard à base rectangulaire à parois maçonnées, et voûtées en dessus. Au dire des connaisseurs, l'arceau qui soutient cette voûte est très ancien et remonterait aux premières années du XIII° siècle. Cette source a beaucoup diminué d'importance depuis une cinquantaine d'années, et surtout depuis quelques siècles. Selon Jules Richard, son débit était considérable à l'époque où les vainqueurs de la Gaule tracèrent ces belles voies qui parcouraient notre contrée en tous sens et dont deux des principales se croisaient à quelques pas seulement de ladite source.

Peut-être faudrait-il remonter à cette époque si lointaine, où les voyageurs prenaient de nombreuses ablutions pour trouver l'origine de cette appellation " fontaine des Bains ", et par voie de conséquence, l'origine de Bagnault; le nom évoque aussi l'idée de bains. Cet emplacement, au carrefour des deux chemins les plus fréquenté de la contrée, l'abondance et la pureté des eaux, tout devait concourir à faire de cette localité une station balnéaire; mais jusqu'à ce jour, aucune preuve concluante n'est venue donner crédit à cette assertion.

L'appellation de " fontaine des Bancs " a été substituée à la première au cours du moyen-âge. Elle serait due à la présence de bancs installés autrefois dans le voisinage de la fontaine les jours de marchés à Bagnault. Antérieurement au XVIII° siècle, il se tenait dans ce village un marché important et les transactions commerciales y étaient fort actives. Plusieurs bancs y étaient mis à la disposition des assistants afin qu'ils puissent goûter les charmes d'un repos nécessité par les fatigues d'un long voyage. Le nom de fontaine des Bancs a dû être emprunté à la présence de sièges.

Fontaine de Thuet. Elle est située un peu en dehors du village de Bagnault, à une centaine de mètres en aval du pont (l'ancien pontreau que l'on a remplacé par un nouveau dans la seconde moitié du siècle dernier) sur la rive gauche du cours d'eau, on pourrait presque dire dans son lit, qu'elle élargit tout à coup de plusieurs mètres. Son débit est considérable et l'on voit l'eau sourdre sur une surface de quatre ou cinq mètres carrés entre chaque pierre du fond. Les sécheresses les plus grandes n'ont jamais pu, jusqu'à présent, interrompre le débit de la source principale; elle diminue parfois mais ne tarit jamais.

Quelle tradition plus ou moins obscure se cache sous ce nom de Thuet dont la physionomie germanique nous reporte aux premiers siècles de notre ère, à l'époque des grandes invasions? Notre contrée eut particulièrement à souffrir du passage des barbares qui subjuguèrent le pays. Bagnault se trouvait sur un parcours qui dut être emprunté par quelques-unes de ces hordes avides de pillage.

Le mot Thuet évoque-t-il un souvenir, un reste de leur passage? Rappelle-t-il au contraire quelque divinité locale du paganisme, divinités que nos ancêtres plaçaient un peu partout, mais principalement dans le voisinage des sources et des fontaines parce qu'ils supposaient, dans la naïveté de leurs croyances, que l'eau leur était indispensable comme elle l'était à eux-même? Faut-il voir dans ce nom le souvenir de quelque hideux massacre perpétré dans ce lieu? On pourrait, je crois, sans aucune témérité, rapprocher ce mot du grec thuein qui signifie immoler et qui laisserait par cela même subsister l'idée de sacrifice ou de massacre. Peut-être même ce nom de Thuet n'est-il pas sans analogie avec le mot Thouet lequel désigne un cours d'eau de l'arrondissement de Parthenay?

Quoi qu'il en soit, au nom de cette fontaine, paraît se rattacher une idée religieuse, un souvenir du paganisme. La situation topographique du lieu, la proximité de monuments mégalithiques et celle du chemin de la mer, tout invite à le croire. Un poète local, sagace Odipe moderne dont je dois respecter l'anonymat, aurait déchiffré l'énigme dont s'entoure cette fontaine dans une pièce en vers.

Fontaine de Planche dite fontaine Bouillante ou Bouillonnante. Au moment où la Sèvre achève la traversée du bourg d'Exoudun et cesse de côtoyer les jardins riverains, à une centaine de mètres en amont du moulin de Plancheson lit s'élargit brusquement sur la rive gauche. Il s'arrête au pied des rochers qui le surplombent à pic et dont la surface moussue est voilée ça et là par une touffe de fougère ou un bouquet de ronces; puis, il va se terminer en pointe au moulin, de sorte que cette partie du cours d'eau affecte la forme d'un triangle assez régulier. C'est là l'étang de Planche: à la base duquel se trouve la superbe source dénommée " fontaine de Planche ou fontaine Bouillante " et bien plus rarement " fontaine Bouillonnante ". Ces deux dernières dénominations sont dues au bouillonnement des eaux qui sourdent avec une intensité extraordinaire et se déversent tout de suite dans le lit de la rivière. L'orifice à peu près circulaire par lequel l'eau sort ne mesure pas moins de trente centimètres de diamètre, et cependant le jet impétueux auquel il donne passage se ralentit rarement. Il s'élève en bouillonnant à une hauteur de quarante centimètres pendant les grandes crues et les vagues subitement formées sont surmontées d'une ligne écumeuse qui serpente au milieu du courant.

Il sort en moyenne deux mille litres d'eau par minute, parait-il, mais ce nombre s'élève à huit mille au moment des crues abondantes tandis qu'il faut une sécheresse prolongée pour atténuer seulement sa force.

Dans un rayon de quelques mètres autour de la source principale, on en voit émerger plusieurs autres moins importantes mais dont la réunion constitue un courant fort appréciable qui se confond tout de suite avec le principal courant. L'eau de ces sources est très limpide sauf en hiver où elle prend parfois une teinte légèrement pierreuse.

Il ne me semble pas que l'on doive attribuer cette source, comme l'ont prétendu à tort quelques-uns, à une résurgence d'une partie des eaux provenant du courant souterrain de la Sèvre. L'examen attentif du relief du sol, la disposition des assises géologiques et leur nature, portent à croire et à admettre qu'elle est uniquement due aux eaux d'infiltration de la région des Bois. Celles-ci, après avoir circulé en différents sens sur une couche imperméable, selon les caprices de la stratification des couches du sous-sol, finissent par se concentrer en un point unique, sorte d'excavation ou de lac souterrain dont le trop-plein s'évacue d'une façon permanente par une sorte de siphon naturel qu'alimente régulièrement la source.

Selon d'anciennes traditions mises à jour par feu le docteur Sauzé, cette source aurait eu autrefois quelque célébrité. Lors de l'établissement du christianisme en Poitou, au quatrième siècle, Saint Martin serait venu pour évangéliser la contrée et combattre l'influence de la collégiale druidique de Bougon. Les eaux de la fontaine Bouillante, rappelant les paroles de l'écriture sainte: " fons aquae salientis, in vitam aeternam " (fontaine jaillissant pour la vie éternelle) servirent au baptême des premiers néophytes. La popularité de Saint Martin et la célébrité de la source ont diminué au fur et à mesure que les siècles se sont écoulés; le temps a recouvert d'un voile toujours plus épais ces souvenirs si intéressants de nos origines chrétiennes, mais ce qui s'est conservé malgré tout, c'est la beauté pittoresque de cette source et la qualité de ses eaux. Disons aussi qu'une curieuse coutume, écho affaibli mais toujours reconnaissable des antiques croyances en honneur à l'époque du paganisme, a survécu jusqu'à nos jours. Les jeunes filles d'Exoudun se plaisaient encore, il y a quelques années à une naïve adjuration: elles jetaient deux épingles dans la fontaine en souhaitant qu'elles tombassent en croix, ce qui était alors le présage d'un mariage prochain.1

Fontaine de la Sauvagère. A peu près en face de la fontaine bouillante, sur la rive opposée du cours d'eau, se trouve la fontaine de la Sauvagère. Elle est alimentée par une source qui n'a rien de comparable avec la précédente. Son débit a pu être important pendant des siècles antérieurs; il se réduit, de nos jours, à un simple filet d'eau qui se déverse dans un lavoir et de là dans une sorte de bassin où vont s'abreuver les animaux. Le trop-plein se déverse ensuite dans un fossé d'écoulement qui le conduit à la rivière.

Elle continue, située à quelques ............" en dessous de la " première église archipresbytérale dut fournir l'eau qui, selon " toutes probabilités, servit aux premières immersions des " chrétiens, aux premiers baptêmes ". (Jules Richard " Le Mellois ")

L'ancien tènement de la Sauvagère dans lequel se trouvait cette source " est limité par la grande rue actuelle du bourg et le lit de la Sèvre ". Ce tènement était autrefois un bois " le bois sacré, Saltus, Sauvagère; c'était le lucus ". (d°. - d°.)

Il est hors de doute que cette fontaine et la précédente ont joué un rôle important lors de l'établissement du christianisme dans cette contrée, quand les illustres propagateurs Saint Martin, Saint, Saint Martial, Saint Héray et autres, dont les noms ne nous sont point connus, s'évertuaient à faire disparaître peu à peu le reste du paganisme gaulois.

Fontaine du Ragouillet. Elle est d'intérêt tout à fait secondaire et ne mérite d'être citée que pour mémoire. Située au fond de la vallée, à quelques mètres de la route de Saint-Pompain à Couhé, elle est entourée par des constructions, maisons ou servitudes. Il est même vraisemblable qu'elle a contribué à donner à ce quartier la dénomination assez irrévérencieuse de " Quartier du Ragouillet " sous lequel on le désigne. C'est que les eaux de ruissellement qui, au moment des grandes pluies, dévalaient autrefois de certaines rues et de la route en dessous desquelles elle se trouve, venaient se mêler aux siennes que rien ne protégeait contre cet envahissement et leur communiquaient une teinte boueuse qui les rendait impropres à la consommation. Elles s'écoulaient ensuite dans une ruelle sur la chaussée de laquelle elles déposaient un limon gras et semi-liquide qui donnait à ce lieu l'aspect d'un cloaque " d'un ragouillet, ragouill.... ".

Fontaine d'Izarnay. Aucune des fontaines dont j'ai parlé jusqu'à présent n'offre une eau d'une pureté plus grande, d'une limpidité plus parfaite, d'un goût plus agréable. Pluies d'automne ou d'hiver, crues ou débordements passent indifféremment sans en altérer la transparence qui se trouve encore accentuée par le lit de sable fin parsemé de friganes sur lequel elle coule.

Située en face d'Izarnay, sur le bord de la route de la vallée, elle est alimentée par une belle et forte source qui débouche au pied du plateau des Chaumes de la Boîte. Ce plateau brûlant et aride, privé d'eau en été, n'en donne pas moins naissance à un grand nombre de sources qui se perdent aussitôt dans la Sèvre.

Il y a quelques siècles, un aqueduc, construit à grands frais avec des dalles en pierre enchâssées les unes dans les autres, était destiné à conduire au château de La Mothe l'eau nécessaire à la consommation de ses habitants. L'un des seigneurs, le comte de Parabère, frappé par la pureté et la qualité des eaux de cette source, n'avait pas reculé, après accord avec le châtelain de la Place Forte, devant le travail et la dépense considérable que devait entraîner une canalisation longue de trois kilomètres au moins. On retrouve encore de nombreuses traces de cet aqueduc qui suivait, dans la vallée, une ligne parallèle au cours d'eau sans même éviter les méandres.

Pendant plus d'un siècle, l'eau de la fontaine fut ainsi captée et dirigée par cette voie vers le château. Elle cesse de l'être quand des obstructions s'étant produites, la circulation devint plus difficile et finit même par être tout à fait interrompue. Au lieu de faire opérer le nettoyage de l'aqueduc, on l'abandonna et on renonça de ce chef aux eaux d'Izarnay.

De temps immémorial, et même encore à notre époque, cette source a été l'objet de croyances fabuleuses. Ne lui attribue-t-on pas le pouvoir mirifique de rendre fécondes les jeunes mariées qui, le jour de leurs épousailles, vont y tremper la semelle de leurs chaussures.

Cette vielle coutume, qui se retrouve à Pamproux, à la Roche-Ruffin, et qui tend à disparaître, se pratiquait de la manière suivante: Après la célébration des cérémonies civile et religieuse du mariage, les nouvelles épousées se rendaient à la fontaine miraculeuse en compagnie de leurs invités, trempaient la semelle de leurs blanches chaussures dans l'eau de la source, pendant que les assistants prononçaient toutes sortes d'incantations burlesques. On appelait cela " faire botter la mariée". Inutile de rajouter que le retour s'effectuait au milieu des rires, des quolibets, de plaisanteries plus ou moins grivoises.

Aucune statistique n'a été établie (ce qui est une regrettable lacune) pour rendre comte si réellement la source possède la vertu qu'on lui attribue. Il paraît toutefois que certaines mariées ont obtenu dans la suite, (au-delà même de leurs désirs) ce qu'elles avaient demandé en silence à la bonne source.

Fontaine de Fontblanche. De même que Bagnault doit son nom à ses fontaines et à ses sources, de même Fontblanche doit le sien à la source qui forme le ruisseau dit de Fontblanche (fonte albo).

C'est presque à fleur de terre et à une altitude de 150 mètres que l'eau sort de terre. Après avoir rempli une excavation grossièrement maçonnée, l'excédent forme ensuite le ruisseau qui s'achemine vers le moulin de Foucault dont il actionne la roue motrice, traverse la route de La Mothe à Sauzé-Vaussais et est absorbée par son lit même avant d'avoir pu atteindre le moulin de Brieuil.

Le voisinage de cette source et la beauté du paysage firent qu'un ancien seigneur de la contrée, Raoul I° d'Exoudun, fonda en ces lieux, dans les premières années du treizième siècle, un prieuré qu'il fit occuper par des moines de l'abbaye de La Couronne. C'est à leur instigation que fut tracée l'inscription dont une partie seulement nous a été conservée mais dont le sens s'applique, à n'en pas douter, à cette source. La voici telle qu'il m'a été possible de la relever:

TANDEM - ALIQVANDO

A-DOMINO-FACTUM-EST

ISTVD

ET-EST MIRABILE-IN

OCCVLIS-NOSTRIS

Au-dessous, sont représentées les armoiries du prieur Leduc.

Les mots tandem alquando ne seraient que la fin d'une phrase dont la première partie a disparu. A domino factum est istud et est mirabile in occulis nostris peut se traduire de la manière suivante: " c'est le Seigneur qui a fait cela et c'est admirable à nos yeux. "

*

* *

En dehors du cours d'eau et des fontaines dont je viens de parler, existe un nombre considérable de sources pérennes ou temporaires qui se rencontrent de Bagnault à Grand-Vault et qui sont dues aux infiltrations des eaux pluviales à travers les assises géologiques des deux plateaux riverains.

(1) Cette singulière coutume se pratique également à Saintes, à la fontaine de Sainte Eustelle dont l'origine est ornée d'une curieuse légende. Une jeune fille, Eustelle, fille du gouverneur de la province, fut convertie au christianisme par Saint Eutrope. Elle avait un fiancé à qui elle renonce; celui-ci insiste ; un jour, le jeune fille impatientée frappa le sol du pied; il en jaillit une source; c'est la fontaine de Sainte Eustelle, bien connue dans toute la région. Cette fontaine est pavée d'épingles. En effet, les jeunes fille de la Saintonge qui désirent un mari, (et à la quantité d'épingles on peut juger si le nombre est élevé) viennent là jeter deux épingles; si elles tombent en croix au fond, elles se marieront dans l'année.. (Louis Audiat " Les monuments de Saintes ")


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