Généalogie

Qui étaient mes ancêtres......................................

SOUVENIRS SUR LA FAMILLE LECONTE

Rassemblés en 1908 par tante Marguerite TRIAUD (épouse MARTIN), soeur de mon père (Maurice TRIAUD), mère de tante Simone (MARTIN)

(Ecrits par Georges TRIAUD le 28/11/1972)


Monsieur Pierre, Louis LECONTE (1796-1857), père de ma mère: madame TRIAUD, était originaire d'Amiens où son père était imprimeur. Il fit ses études chez les Jésuites de Pontlevoy (Loire et Cher) et fut reçu 1° à l'Ecole Normale puis entra dans l'université. Il fut nommé professeur au lycée de Besançon où il avait comme aumônier monsieur de Marguery, plus tard évêque d'Autun, avec lequel il conserva des relations très amicales. Nommé Inspecteur d'Académie à Cahors, il s'y maria en 1834 avec mademoiselle Céline DUCLAUX dont le père était Receveur Général et habitait la maison d'Armagnac. Dénoncé pour ses idées royalistes et religieuses, il fut mis à la retraite en 1848. En 1850, il fut remis en activité par monsieur de Parvin, ministre de l'instruction publique, et nommé à Aurillac, comme recteur, où il resta 5 ans, puis il prit sa retraite à Cahors. Il mourut à Prayssac en 1857 d'une fluxion de poitrine au moment où il prenait possession de l'héritage de Prayssac venant de madame LEMOZY (sa belle-mère). Monsieur LECONTE était fils unique. Son père, l'imprimeur, avait eu deux fils, Léon, célibataire et Casimir, cousins germains de Pierre. Casimir fut le père de madame Lefevre Gonzales, et le frère de madame Leroux, mère du Père Jésuite, historiographe de la compagnie, mort en 1868.

De son mariage avec Céline DUCLAUX, monsieur LECONTE eut 5 enfants, dont l'aîné Léon mourut en bas âge, puis ils eurent Marie (Antoinette), née avril 1837 et qui épousa, le 22 février 1859, monsieur Camille TRIAUD, employé des Tabacs à Cahors: mon père et ma mère. Ils eurent 4 enfants : Louis, Maurice, Marguerite (moi), et Pierre. La carrière de mon père fut dure et laborieuse. Il a pu arriver à la direction grâce à son travail et à sa propre valeur. Il conquit des grades assez rapidement, sans redouter les déménagements qui étaient coûteux, étant toujours nommé du nord à l'est ou au midi et ayant une nombreuse famille qu'accompagnait une vieille bonne Rosalie qui a passé avec nous plus de vingt-cinq ans. Je lui donne ici un souvenir de reconnaissance car elle a été pour nous bien dévouée. Ma mère la prit au moment de son mariage et elle nous quitta en 1880. Elle alla servir monsieur l'Abbé Cayla, curé de Libos, chez lequel elle mourut en 1900, au mois de février.

Pendant la guerre de 1870, nous habitions Metz que nous avons dû quitter très rapidement, laissant mon père seul avec mon oncle MOREAU (le futur Général). Ce fut alors que Rosalie se dévoua. Elle resta avec ces messieurs tout le temps du siège, s'ingéniant à les bien nourrir malgré la misère et la pénurie des vivres. Paul, né en 1839, mourut à l'île Maurice en 1894. Jules né en 1847.

A la mort de leur mère, madame LECONTE, en 1860 (elle mourut à Cahors de la petite vérole noire qu'elle contracta en allant à la messe à l'hôpital) monsieur Casimir LECONTE, cousin germain de leur père, les engagea fortement à partir à l'île Maurice où il les recommanda chaleureusement à monsieur de Courson. Après des semaines d'hésitations, ils se décidèrent à partir en 1864. Après avoir eu des débuts assez brillants, un cyclone ravagea les docks construits par monsieur de Courson et emporta au large plusieurs navires chargés, lui appartenant. Alors commença pour eux une vie laborieuse et pénible et où ils ne firent que végéter. Jules épousa mademoiselle de Courson (Eudoxie) dont il eut 5 enfants.

1° Casimir, marié à Marthe Bouvet dont il a eu 3 enfants. Il habite Madagascar où il possède des propriétés. C'est là qu'il a perdu sa jeune femme à la naissance du quatrième, mort avec elle.

2° Marie, qui a épousé monsieur de Caita, directeur de la société Diégo Garcia. Ils n'ont pas eu d'enfant. Marie est morte à Bordeaux après la guerre 14/18 à la suite d'une opération et est enterrée à Cahors dans le caveau des Martin.

3° Eudoxie, qui a épousé monsieur Le Juge de Segrais dont elle a eu 3 enfants.

4° Juliette, qui n'est pas mariée.

5° Louis, qui est avocat et a devant lui une belle situation. C'est le seul que nous connaissions, étant venu en Angleterre et en France avec une bourse pour y terminer ses études.

Jules fut nommé directeur de Diego Garcia, place occupée aujourd'hui par son gendre. Il perdit sa femme en 1885. Il resta à l'île Maurice où il se remaria avec mademoiselle Angèle de Bissy et eu deux filles Irène et Simone.

Paul, fiancé à mademoiselle Marie de Courson, soeur d'Eudoxie, eut la douleur de perdre sa fiancée quelques jours avant leur mariage, enlevée par la fièvre typhoïde. Après plusieurs années, il se maria avec mademoiselle Isabelle de Bissy dont il a 5 filles. L'une d'elle, Isabelle, a épousé James Bax. La seconde, Louise, a épousé monsieur Jules Jauffret. Antoinette, née en 1843, épousa, en 1864, monsieur André Roussagne, notaire à Beaumont de Lomagne (82). D'un caractère inconstant et inquiet il changea souvent de situation et il finit par manger toute leur fortune. Ils sont morts à Paris dans la misère.

 


 

Lettre de Louis LECONTE à sa fiancée.

 

10 avril 1885

Je ne sais quel poète a dit:

« En faisant des heureux, un roi l'est à son tour. »

Si, comme je le pense, on en peut dire autant d'une femme aimable et aimante, en vérité, vous pouvez vous vanter d'être la plus heureuse des femmes, car vous faites le plus heureux des hommes. Et ce qui devrait ajouter à votre bonheur c'est que je sens le mieux dans toute son étendue. Ce n'est pas être heureux, que d'être heureux sans s'en apercevoir. Pour moi je suis heureux et je sens fortement que je le suis. Je suis tranquille pour l'avenir; je commence à l'être pour le présent, parce que je commence à bien percevoir que votre coeur n'est pas insensible à l'hommage de mes voeux, de mes sentiments, de ma constance, de ma fidélité. Oh! Puissiez-vous bientôt m'en donner la douce assurance! Puisse cette précieuse parole faire partie de la réponse que vous me promettez de faire de vive voix à ma dernière et peut-être trop longue lettre!

Que ne puis-je moi-même vous dire tout ce que je ressens de joie et de reconnaissance pour la bonté que vous avez eu de me répondre? Quelle agréable surprise vous m'aviez confiée! Comme j'apprécie l'empressement que vous avez mis à me donner cette preuve de vos bienveillantes dispositions pour moi! C'est un bien grand encouragement que vous m'avez donné à redoubler d'ardeur et d'efforts pour m'en rendre digne, et je n'ai pas besoin de vous dire que c'est un devoir sacré que je saurai remplir comme tous les autres. En attendant, réjouissez-vous de tout le bien que vous m'avez fait par cette courte, mais si aimable lettre. Je l'ai lue, relue, et relue encore avec un plaisir indicible et toujours croissant. Quelle jouissance ne promettez-vous pour lorsque votre coeur pourra parler librement à mon coeur.

J'aurais été bien charmé de pouvoir causer avec vous aussi longuement que je l'aurais désiré et que j'en éprouve le besoin, mais avec la meilleure volonté du monde, je n'en ai ni le temps, ni le loisir. Il faut que vous ayez la bonté d'excuser tout mon laconisme que mon griffonnage toujours occupé de mes maudits examens, obligé de courir pour consulter au sujet des publications à faire ou non à Amiens. Je vous écris à la hâte sans pouvoir même relire ce que j'écris, vous voyez qu'il faut bien que je compte sur votre indulgence.

Permettez-moi de vous dire à ce sujet que monsieur votre frère aurait bien mieux fait, au lieu de me donner son avis personnel, d'aller demander celui du maire de Duravel. Car qu'importe que la loi soit obscure ou non sur ce point, si le maire de Duravel n'exige pas cette formalité pour nous marier? Or monsieur Achille m'a dit qu'il était si bien avec le maire qu'il lui ferait faire tout ce qu'il voudrait. C'était bien alors le cas d'user de son influence sur l'esprit du maire pour le décider à me dispenser des retards sans fin qu'entraînerait cette publication. Un de mes amis, conseiller-auditeur à la cour royale d'Amiens, m'écrit hier que cette publication n'est pas nécessaire. Monsieur l'avocat Dufour que j'ai consulté de nouveau aujourd'hui m'a donné la même assurance en ajoutant que le maire de Duravel n'aurait aucune raison de me faire cette chicane. Monsieur Eugène Perié que, sur l'invitation de monsieur votre frère, j'ai été aussi consulté, est parfaitement du même avis; il doit me donner une note en réponse à celle que vous m'avez envoyée. Il me semble que l'autorité de ces trois messieurs peut bien contrebalancer celle du maire de Duravel, dans le cas où il croirait être d'un avis contraire. Je vous prie donc instamment d'engager monsieur votre frère à l'aller voir, à s'entendre avec lui et à me faire connaître sa décision. Il est du plus haut intérêt que je la reçoive le plus tôt possible, dimanche au plus tard, afin que s'il faut absolument faire cette publication à Amiens, ma lettre arrive au plus tard samedi prochain, 18 avril, de manière que cette publication se fasse le lendemain, sans quoi ce serait un retard non pas de huit, mais de quinze jours et peut-être de trois semaines. Ce retard me contrarierait au dernier point: aussi je prends la liberté de renouveler ce point important à toute la sollicitude de madame votre mère.

Lorsque dimanche dernier je passais à la Bastille, monsieur Lafon, votre cousin, me remit un projet de contrat, sur lequel, d'après sa propre invitation, je consultai deux hommes d'affaires et qui a donné lieu à quelques observations. Je les communiquerai à monsieur Dubrues, en m'en rapportant entièrement à sa décision, tant est grande et illimitée la confiance qu'il m'a inspirée! Nous avons été bientôt et complètement d'accord sur tous les points. Il part demain pour Preyssac d'où il continuera lundi sa route pour Villeneuve. Comme il ne peut s'arrêter à Duravel, nous sommes convenus que je partirai moi-même lundi à Cahors pour me joindre à lui à Preyssac et que pendant le temps que la voiture reste à Puy l'Evêque pour le déjeuner des voyageurs, nous irons trouver monsieur Dulac à qui nous soumettrons toute cette affaire, que lui-même ensuite soumettra à l'approbation de votre famille. Sur ce point, comme sur tous les autres, je suis dans une sécurité parfaite, car persuadé que ces messieurs ne peuvent vouloir que ce qui est juste. Je me confie en aveugle à leur délicatesse et à leur loyauté. Peut-être serait-il bien imprudent si toutefois il n'y a pas d'indiscrétion, de donner avis de notre intention à monsieur Dulac, afin que dans le cas toutefois où ses affaires le lui permettraient, il fasse en sorte de se trouver chez lui à l'heure de l'arrivée de la voiture. Madame votre mère aura la bonté de vous dire ce qu'il convient de faire à ce sujet. Je désire beaucoup que cette entrevue ait lieu, afin que tout étant bien réglé et arrêté, je n'aie plus qu'à penser uniquement, librement, entièrement, au bonheur de vous aimer et de vous posséder. Je vous le répète, tout, j'en suis sûr, se passera comme dans l'entrevue que j'eus avec monsieur Dulac à Duravel; un quart d'heure suffira pour tomber parfaitement d'accord sur tous les points.

C'est donc lundi, dans trois jours, que j'aurai le bonheur de vous revoir, de vous exprimer, non plus sur un froid et insensible papier, mais de vive voix, mais par la vivacité de mon regard, par le mouvement animé de ma physionomie et de mon être tout entier, ma joie, mon amour, mon ardent défi de me donner à vous, de me vouer tout entier à votre bonheur, que ne suis-je déjà sur la route de Duravel? Que ne suis-je près de vous pour recueillir de votre bouche quelque encouragement, quelques unes de ces paroles consolantes qui rafraîchissent le coeur et lui font attendre plus patiemment le moment si désiré de son bonheur.

J'aurai bien des choses à vous dire moi-même. J'en ai bonne provision; heureusement que cette fois j'aurais le temps de séjourner à Duravel et de jouir de votre présence. Moments délicieux qui viennent toujours trop tard et finissent toujours trop tôt! Vous me verrez revenir tout rayonnant de joie et de bonheur, dans les mêmes dispositions, plein des mêmes sentiments qui n'ont pu que se fortifier et s'accroître. Puisse-t-il en être de même des vôtres!

Je n'ai pas eu le temps de m'occuper aujourd'hui de maisons; j'y penserai demain et après-demain, pour pouvoir vous fixer sur celle que nous devons choisir. Vous savez que je ne ferai rien sans votre assentiment.

Demain on nous affichera ici comme à Duravel. Je pense que la note de monsieur Pirié dissipera tous les doutes de monsieur votre frère.

Présentez mes respectueux hommages à madame votre mère.

Adieu, oui adieu; ce mot en dit assez en attendant mieux. Soignez votre santé et aimez-moi comme je vous aime.

Louis Leconte


Généalogie

me contacter: dtriaud@free.fr